retour Accueil Les derniers moulins de Melun

plan 1896
Partie Nord-Est de Melun extrait d'un plan paru dans un guide touristique en 1896 (*6)

L'Almont en aval de Trois-Moulins

A partir du bas de Trois-Moulins l'Almont coule, au fond d'une vallée, le long d'une série de jardins potagers et maraîchers situés rue de Trois-Moulins. Elle est bordée à droite par le faubourg des Carmes et à gauche par le faubourg Saint-Liesne. Aujourd'hui ces 2 rives sont dominées par les cités H.L.M. des quartiers de l'Almont.
Un octroi (péage pour les marchandises) marquait l'entrée dans la ville de Melun. Le tramway de Verneuil y a avait une halte.
La rivière alimentait ensuite le “ Moulin Farineau ” et le “ Moulin de Poignet ”... Elle passe ensuite le long du “ mail Gaillardon ” (où était situé la gare du tacot de Verneuil) avant de se jeter dans la Seine, en amont de la ville de Melun, près de “ Vaux-le-Pénil ” (encore le nom de “ vaux ” pour marquer la réunion des 2 vallées : Almont et Seine).
carte postale ancienne
Moulin de Poignet (carte postale ancienne)
placer le curseur sur l'image pour comparer avec la vue actuelle
(© Lucien V. 2004)
Cette zone a sûrement été gagnée sur d'anciens marais comme le montre le nom de la “ rue des marais ” (actuelle rue Camille Flamarion). Cette zone était occupée aussi par des jardins maraîchers. Elle est marquée par de nombreux bras (dont certains morts). Les inondations (voir vue de la crue de 1910) envahissaient souvent la vallée.
Les moulins n'étaient pas aménagés avec un bief dérivé du cours principal, contrairement aux autres en amont, mais avec un barrage en maçonnerie (voir la carte postale du barrage du moulin de Poignet) placé en biais sur le court de la rivière et renvoyant l'eau dans un chenal, sur le côté, vers une vanne placée avant la roue à entraîner. Cette configuration permettait un écoulement normal de l'eau quelque soit le débit et d'éviter que les inondations n'endommagent le moulin.


moulin Farineau

carte postale ancienne
Ancien moulin Farineau, scierie Ganot, vers 1935.
Cette vue est à comparer avec une autre extraite
d'un film 9,5mm. On aperçoit au centre de l'image
le haut du clocher de l'église St-Aspais
détruit pendant la guerre de 39/45
© collections privées
Le moulin Farineau était situé près de la “ place Breton ” (repère F sur le plan). J'ai assez peu d'informations sur lui.
Son nom a la même racine latine que farine (farina). Cela indique t-il un nom ancien ? Cela voulait-il dire simplement moulin à farine ?
On trouve la trace d'une “ ruelle du moulin Farineau ” dans des actes anciens.
“ Moulin Farinot, moulin farinier (à eau) de M. Bicheret, en l'an X ” (*3)
Le moulin fut transformé en scierie mécanique en 1887 jusqu'à entre les 2 dernières guerres (scierie Ganot).
Ce quartier abritait la caserne d'infanterie Breton (anciennement St-Liesne) depuis 1848. Celle ci s'était installée à l'emplacement d'une ancienne fabrique (bonneterie). Cette zone était d'ailleurs occupée par de nombreuses fabriques depuis le XVIIe siècle : bonneterie, filature, toiles peintes, première brasserie Gruber, tannerie... Il reste encore la “ rue des fabriques ” et la “ rue des petites fabriques ” (ou petite rue des fabriques).
“ Une importante manufacture de cotonnades et de toiles peintes fut construite et fondée dans le quartier St-Liesne, en 1775, à côté du moulin Farineau qui, depuis, a été transformé en une scierie mécanique, exploitée aujourd'hui par MM. Ganot frères. ” (*5)
D'autres activités ont pris la place du moulin. Il était situé à l'emplacement du dépôt de ferrailles “ Vendrand ”. A son emplacement, il reste quelques bâtiments dont il est difficile de dire s'ils faisaient parti du moulin (ou de la scierie).


moulin de Poignet

Appelé aussi moulin des Poignes (*1), ce moulin est très ancien. Il appartenait au domaine royal. Il figure, avec le moulin du Roy, dans l'acte de vente fait par Henri IV au gouverneur de Melun en 1594. Il est situé au début de la rue de Trois-Moulins (repère P sur le plan)
© Lucien V. (2004)
Moulin de Poignet, rue de Trois-Moulins,
en venant de la place St-Jean. © Lucien V. (2004)
Cette vue est à comparer avec
une carte postale de la crue de 1910 au même endroit.
L'abbé Fortin (*6) fait venir son nom du latin “ pugnaculum ” : petite forteresse. Il était situé à l'extérieur de l'enceinte fortifiée de Melun, au pied de la falaise formant une fortification naturelle. Un escalier en gros blocs de pierre permet de monter à la “ rue du moulin de Poignet ” située presque à la hauteur du toit. On a du mal à imaginer que cet escalier ai pu servir à descendre des sacs de blé ou monter les sacs de farine : à dos d'hommes, à dos d'ânes ou de mulets ? S'agissait-il d'un accès en cas d'inondation ?
L'abbé Guilbert (*1) nous rapporte en 1731 [raconté aussi par l'Abbé Goudemetz (*2)] :

“ Tous les ans au 1er de mai, le maître particulier et autres officiers des eaux et forêts s'assemblent au nom du roi, sur les bords de la forêt de Fontainebleau du côté de Melun, autour d'une grande table de pierre appelée le Table du roi, à laquelle doivent se trouver, sous peine d'amende, ceux qui sont tenus à des redevances comme il s'ensuit :
L'abbesse du Lys près de Melun, ou quelqu'un de sa part, un jambon cuit et deux bouteilles de vin.
Le meunier du Moulin des Poignes du faubourg St-Liesne de Melun, un jambon et deux bouteilles de vin. (ce moulin appartient au Roi)
Le boulanger du four-à-ban du roi de la même ville, un grand gâteau.
Les habitants du faubourg des Carmes et d'un canton appelé le Petit clos de la paroisse Saint-Ambroise, cinq deniers pour chaque feu.
Les pêcheurs ayant pêcherie sur le Loing et la Seine, de l'étendue de la maîtrise des eaux de Fontainebleau, tenus de porter chacun un plat du plus beau poisson.
Le maître des hautes œuvres de Melun, un grand gâteau et deux deniers.
Chaque nouveau marié et les nouveaux habitants de l'année du Petit clos, un gâteau et 5 deniers, à peine de 60 sols parisis d'amende.
Cette cérémonie attire une foule prodigieuse de monde.
 ”

“ Moulin Poignet, moulin farinier (à eau) de M. Picard, en l'an X ” (*3)
Après l'arrêt du moulin, il devient une dépendance de la “ maison Barbier ”, le Fauchon Melunais installé rue de l'Hôtel-de-Ville (voir la notice historique). On y fabrique notamment des pains de glace “ hygiénique ” pour les armoires frigorifiques. Aujourd'hui il a été transformé en résidence d'habitation.


les Moulins de Melun

carte postale ancienneCes moulins n'étaient pas sur l'Almont mais installés sur l'île, quai de la Reine Blanche. Ils datent de le fin du XIXe siècle. Ils marquent l'entrée de la profession dans l'aire industrielle. Ce sont en partie eux qui ont entraînés la mort des moulins à eau et à vent (entre 1880 et 1890).
A leurs débuts, ils étaient actionnées à la vapeur. Plus tard l'électricité prendra le relais. Ils sont modernes, ils n'écrasent plus le grain entre des meules mais entre des cylindres (voir détail du nom sur le bâtiment).
La société “ les Moulins de Melun ” date d'avant 1926, elle a fait l'objet d'une liquidation (cession partielle) en juillet 1997.
Le dernier meunier de Trois-Moulins, le plus près de ces installations industrielles, racontait des histoires sur la concurrence très forte, pas toujours très honnête, que se livraient ces moulins.
La première carte postale montre les installations avant 1910 (© collection Lucien V.). La configuration est identique à une gravure de 1896 (*4). On remarquera la grande cheminée en brique de l'installation à vapeur.
Il existe plusieurs vues, sous des angles différents, du moulin à cette époque.
carte postale ancienne La deuxième nous donne une idée des installations avant la guerre de 39/45. On remarquera le portique permettant de charger ou décharger les bateaux.
(© collection Lucien V.)
© Lucien V. 2004 Après la guerre, les bâtiments endommagés seront refaits (architecte Wanery) et un imposant silo à grain construit. Celui-ci sera détruit (vers 1980) pour la construction de l'université de Melun. En août 2005, les bâtiments du moulin (photo ci contre © Lucien V. 2004) sont démolis pour faire place à un complexe immobilier. Coincé entre les ruines de l'église Saint-Sauveur et la moderne université, ce quartier fait parti d'un projet de réaménagement du quai pour permettre l'amarrage des bateaux de plaisance.


(*1) “ Description historique des château, bourg et forest de Fontainebleau ” par l'abbé Guilbert (1731)

(*2) “ Voyage de Champeaux à Meaux fait en 1785 ” par l'abbé Henry de Goudemetz

(*3) “ État des moulins à farine de Seine-et-Marne en l'an X ” (A.N. F20 294) paru dans le bulletin Nº31 du C.G.H.S.M.

(*4) “ Les étapes d'un touriste en France ; Promenades et Excursions dans les environs de Paris ” par Alexis Martin (1896)

(*5) “ Histoire des maires de Melun, 1506-1891 ” par Albert Huguenin (1897)

(*6) “ Le village de Maincy-lez-Melun ” par l'abbé Fortin, curé de Maincy (1927)

Suite vers : Melun, Ville Royale, la Lutèce Briarde

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